Le chant des sirènes et la peur

 

Capitaine Forgis, 19 avril 2476

Encore un qui est revenu s'échouer sur les plages, nous devons pourtant partir, cette île n'a pas d'eau douce, nos réserves sont de plus en plus réduites. Les habitants de la dernière île où nous avions fait escale nous avaient pourtant prévenus, mais nous n'avons pas voulu croire ce que nous prenions pour des légendes. Les faits sont pourtant là, nous étions quinze bateaux en partance du dernier port libre depuis que le tyran avait pris le pouvoir. Nous étions partis le coeur plein d'espoir en quête d'une terre de liberté où nous pourrions nous installer. Lors de notre escale à Vanuita, notre dernière escale, nous étions encore treize après des centaines de jours en mer, nous pûmes refaire des réserves mais alors que nous leur expliquions que nous voulions faire descendre vers le Sud ils nous ont mis en garde contre les démons des eaux qui prennent les marins. Il ne se passe pas un jour sans que je ne regrette que nous ne les ayons pas écoutés. Quatre bateau se sont échoués sur les rivages de cette île maudite, depuis nous cherchons à repartir mais les courant sont trop violents et nous ramènent presque toujours vers la plage.

Trois de nos bateau ont pu s'échapper pour nous revenir quelques semaines plus tard, les ponts chargés de cadavre ensanglantés. Le dernier parti vient de rentrer, son capitaine s'était fait attacher au mât comme Ulysse pour entendre le fameux chant des sirènes, les matelots dont les oreilles étaient bouchées sont revenus le corps en charpie, il a eu le temps de graver sur le mât « pas de chant », si je ne me trompe pas ces quelques mots peuvent tous nous sauver.

Je suis le plus âgé des capitaines qui restent, on me demande de prendre une décision, de trouver une solution. La vie des survivants est entre mes mains, cette lourde charge me pétrifie. Il nous reste six bateaux, je crois que j'ai un plan, de tout façon nous devons tenter de fuir nous ne pouvons vivre sur cette terre aride. Nous allons attacher les bateaux, nous armer tous, rester sur le pont, les oreilles libres et nous battre, chaque femme, chaque enfant sera armé, nos vies sont en jeu et nous allons défendre notre peau pour trouver la terre de liberté que nous avons cherchée.